Les journées libératrices

Dates : 15 – 16 – 17/04/11

Rédacteur : Anne

Trajet : Gallatire – Misitune – Las Cuevas – Putre – Zapahuira – Poconchile - Arica

 

Je me souviendrai toujours de ce fameux jour où nous avons poussé la porte du Vieux Campeur pour acheter nos duvets. Hadrien demandait au vendeur des sacs de couchage nous permettant de dormir par -10°C et moi je pensais qu’il prenait de la marge, la ceinture et les bretelles et que jamais nous n’aurions besoin de tels équipements. Et bien le jour où nous dormons à plus de 4000m d’altitude que le compteur indique une température de -5°C à 8h que l’eau des poches à eau est gelée alors qu’elles sont restées sous l’abside et que le réchaud est fainéant parce que lui aussi est gelé, alors on repense avec beaucoup d’émotion à ce fameux jour où nous sortions avec nos deux duvets sous le bras. Je reste d’ailleurs subjuguée par le niveau et la qualité de notre équipement. Comment deux toiles peuvent-elles permettre de ne pas geler et deux duvets, nous permettre de dormir comme des bébés alors que le mercure descend sous les -10°C ?

Je profite de cette tribune pour faire part à mon tendre époux de mon admiration et de ma gratitude quant au choix du matériel et à l’organisation de ce voyage. 

 

Sur ces entrefaites, nous voici de nouveau sur nos vélos avec l’espoir de retrouver l’asphalte avant de poser la tente.

Le volcan Gallatire est très impressionnant car il fume. C’est amusant de voir cette montagne complètement couverte de neige qui fume. Nous savons que c’est en principe notre dernier jour de ripio, en tout cas pour ce qui concerne cette portion de route et nous le vivons un peu comme le dernier jour d’école avant les vacances. C’est presque gagné et pourtant pas tant que ça. Nous pédalons sur une route plutôt bonne au milieu des montagnes avec quelques passages sableux par endroit, surtout entre une descente et une montée, dans les cuvettes… Sur le chemin, nous rencontrons deux touristes et leur chauffeur : Angelica, Colette et Sergio. Angelica est très excitée à notre vue et dans ce monde merveilleux, elle me trouve très propre. Je me permets de la contredire car quand on s’approche un peu, on constate rapidement que « propre » n’est pas le bon terme pour me désigner. Bref, nous atteignons le village de Misitune pour le déjeuner et sortons notre dernière cartouche lyophilisée.

A ce moment précis je m’aperçois que ma polaire a disparu et en conclus, désespérée, qu’elle est quelque part sur la route. Me voilà en train de sangloter dans mon riz à la provençale, désolée à l’idée de devoir faire les 24km en montée et descente dans l’autre sens pour aller chercher cette fichue polaire. En effet, c’est dans ce genre de moment que l’on réalise le plus que chaque constituant de ce voyage est unique et indispensable et que je ne peux décemment pas me passer de vêtement que me protège du froid. Je propose à Hadrien d’aller chercher un véhicule qui pourrait me permettre de faire le chemin en sens inverse, dans le village et si jamais, je ne trouvais personne, alors oui, contrainte et forcée je retournerai sur mes pas. Il faut préciser que nous n’avons pas croisé de voiture depuis le début de la matinée quasiment. Me voici donc en route vers le village, lorsqu’un doute sur la direction me prend. Je fais alors demi-tour et trouve Hadrien en pleine conversation avec un Guarda Parque. Il lui explique notre problème, et au moment où j’arrive à leur hauteur, je vois le conducteur ouvrir la portière arrière et en sortir… ma polaire !!!!

Incroyable ! Il savait qu’elle nous appartenait et l’a ramassée ! Je suis folle de joie, je n’y crois presque pas. Elle m’est revenue à peine une demi-heure après que je me sois aperçue de sa disparition, sans que j’ai le temps d’aller à sa recherche, juste le temps de me rendre compte d’à quel point j’avais besoin d’elle. On pourra dire ce qu’on voudra mais ma bonne étoile veille et mon Ange-Gardien est un bosseur acharné ! Merci à tous les deux et surtout au garde forestier.

 

Parc Lauca
Parc Lauca

Le temps de nous remettre de nos émotions autour d’un café cookies, nous voici de nouveau sur la route pour en principe les 20 derniers km de route en terre. Mais la partie n’est pas gagnée pour autant.

Nous nous attendions à ce que ça descende doucement vers le bitume, mais non, ça monte et ça descend allègrement jusqu’au dernier km. Nous pouvons cependant admirer une route splendide avec des volcans enneigés, des montagnes toujours plus hautes. C’est dur mais c’est beau. Finalement il est 17h30 lorsque nous atteignons enfin la route goudronnée tant attendue. Il s’agit de la route 11 qui relie le Chili à la Bolivie et le trafic est dense en conséquence. Nous croisons d’énormes poids lourds qui se dirigent vers le lago Chungara puis la frontière bolivienne. Nous atteignons alors le site de Las Cuevas, qu’Alfonso, le guide chilien rencontré deux jours plus tôt sur la route, nous avait recommandé pour ses thermes.

Le site est désert, les gardes du parc Lauca absents, nous plantons rapidement la tente au milieu des vigognes, bien moins sauvages que leurs collègues de l’intérieur du parc national.

Nous dirigeons ensuite vers la source thermale protégée par un abri et élisons domicile dans cette petite cabane pour la soirée.

Pendant que les pâtes cuisent nous prenons un bain, qui nous délasse et nous repose. Quel bonheur ! Une fois les pâtes avalées, nous sortons de notre abri chauffé pour retrouver notre casita de viaje un poco fria !

Nous nous glissons dans nos sacs de couchage et là : impossible de dormir ! La journée a pourtant était chargée en kilomètres et en dénivelé mais rien à faire, nous pourrions reprendre nos vélos et continuer à pédaler. Alors qu’Hadrien allait s’endormir, une vigogne décide de sprinter à côté de la tente ! Branle-bas ! Plus de peur que de mal, mais nouvelle galère pour trouver le sommeil. Peut-être la source d’eau chaude était-elle euphorisante ?! Pas la moindre idée, pour autant le réveil est sacrément plus dur. 

 

Lauca Arica en descente
Lauca Arica en descente

Même cérémonial que les jours précédents, double toit à dégivrer dès les premiers rayons du soleil, sacs de couchage à faire sécher. Nous sommes prêts tôt ce matin.

C’est sans doute la perspective de rouler sur la route en bitume en principe en descente qui nous aide à nous préparer en un temps record.Nous nous habillons en cosmonaute histoire de ne pas avoir froid et testons pour la première fois nos surchaussures Shimano. Le style laisse franchement à désirer mais rien à dire, c’est très efficace. A ce stade de la journée, j’ai dans l’idée que nous allons faire 150km de descente jusqu’à Arica.

Mais la réalité semble bien différente et si nous descendons régulièrement, nous devons aussi monter régulièrement. Je suis de mauvaise humeur. Je m’étais représenté les choses bien différemment et je suis contrariée d’avoir à faire encore des efforts. J’imaginais pouvoir m’asseoir tranquillement dans mon fauteuil et me laisser glisser, il n’en est rien. Sur notre chemin, nous croisons… nos quatre amis allemands en partance pour un treck dans le parc Lauca. Nous nous arrêtons et nous racontons nos derniers jours.

Nous sommes ravis de nous revoir et c’est de leur guide que nous apprenons que nous aurons entre 60 et 70 km de montée – descente et qu’ensuite ce sera de la vraie descente. Vale ! Vamos entonces ! La route est absolument vertigineuse. Nous voyageons sur une route en corniche. Les descentes sont raides, les montées à la hauteur. A un moment, nous arrêtons et pouvons apercevoir… la mer ! Nous sommes pourtant encore à 3500m d’altitude. C’est absolument magique ! Hadrien qui ne veut pas pédaler dans les montées oublie qu’il possède des freins et fonce toute blinde ! Sa trouillarde de compagne use allègrement de la petite manette grise.

 

Après 48km et 400m de dénivelé nous atteignons le village de Zapahuira. Nous déjeunons dans un restaurant de routiers pour presque rien, au menu soupe et pollo, café et gâteau. Nous sommes au taquet pour les 100 prochains km. Et là… là mes amis, le kif intégral, après une petite montée pour qu’on mérite la descente, nous voici en mode : « je me cale au fond de mon siège et je savoure le paysage ». Vous êtes à bord d’un bobsleigh de la route ! Nous filons sur une route en lacets. Nous sommes minuscules à côté de ces énormes poids lourds qui nous prennent en sympathie, et ces immenses montagnes de sable qui nous entourent. Hadrien dit que nous sommes des moustiques, parce qu’on est tout petits, tout fins et très rapides ! Bref, nos zygomatiques sont bloqués en position ON, on a des moustiques collés sur les dents. Non, c’est pas vrai, je blague ! De temps en temps, nous grimpons une petite montée, celle de l’humilité, qui nous rappelle que tout se mérite !

A 17h, nous arrivons dans la vallée du rio Lluta. Nous avons 119km au compteur. Je crois que ça ne nous était jamais arrivé. Nous sommes encore à 35km d’Arica. Une pause goûter s’impose, nous avons faim malgré tout ce que nous avons mangé au déjeuner. 

 

Arica
Arica

Grâce à ce second souffle, nous nous remettons en route avec l’idée de continuer un maximum jusqu’à en avoir marre et avoir envie de nous poser.

Nous faisons une halte à Poconchile avec l’espoir d’y trouver internet, ce qui nous éviterait d’aller jusqu’à Arica. Internet est absent ou ne fonctionne pas alors on pousse. On pousse tellement que nous voici aux abords d’Arica.

La plage n’est pas si proche, le camping que nous convoitions non plus. Nous avons commencé la journée à 4200m d’altitude, la température extérieure était négative et nous voici au bord de l’océan pacifique, par 25°C. Nous pourrions presque faire un coucou à nos amis de Shanghai.Nous atterrissons donc dans un petit hôtel d’Arica avec Wifi, parfait, 160km.

Nous filons pour diner en ville et commandons dans un comedor un poulet entier avec deux portions de frites et deux bières. Nous nous régalons et à la fin, nous avons nos petits yeux d’alcool !Le lendemain nous nous réveillons avec un vrai mal de tête

. Nous sommes dimanche des Rameaux, nous sommes en ville, le temps de faire une lessive et nous voici partis avec nos drôles de vélos à la cathédrale d’Arica. Cette dernière est une œuvre de notre bon Gustave Eiffel commandée par le Chili. La classe ! La messe est très belle. Nous réalisons que probablement, nous fêterons les Rameaux en France l’année prochaine. A la sortie de la messe, nous sommes interviewés par un journaliste, nous ne savons pas bien pour qui pour quoi, et nous tentons de répondre aux questions dans notre plus beau castellano.

Hadrien parle de mieux en mieux !

 

Nous passons le reste de l’après-midi à Arica sur internet et faisons le plein de contacts, de mails, de vos mots d’encouragements et de réponses aux enfants ! Les batteries pleines de toutes ces bonnes choses, nous quittons Arica par la route de la mer, direction Tacna au Pérou. Nous longeons l’une des plages les plus réputées pour le surf, mais nous interrogeons vraiment sur l’endroit où nous pourrions dormir

. La plage est longée par des terrains vagues surveillés par les vautours. Quand soudain, nous voyons, sur la route, une jolie petite chapelle. Nous nous approchons, il s’agit d’un sanctuaire. Catholique ou non, impossible à savoir, peu importe nous demandons l’hospitalité dans ce petit paradis à l’écart des terrains insécurisés.

Patricia nous accueille les bras ouverts. Elle garde l’endroit et nous ouvre les locaux avec cuisine, toilettes et douche. Nous sommes comblés, alors que ça n’était pas gagné.

La semaine sainte peut commencer. 80km par jour, 2500m de dénivelé en 5 jours… Prêts, feu, go !

 

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Commentaires: 3
  • #1

    luc lauriau (vendredi, 06 mai 2011 21:09)

    Retrouver sa Polaire.... quel bonheur ! surtout par cette température. Mon épouse et moi-même nous nous souvenons d'une nuit à 4 000 M au Népal ...impossible de dormir et quel froid !!
    Passer en quelques heures de - 5 à + 25 c'a fait du bien.
    Nous avons beaucoup appréciés le Chili

  • #2

    Isabelle (lundi, 09 mai 2011 23:00)

    Bravo !! nous avons l'impression d'être auprés de vous !!

  • #3

    Juicer Reviews (samedi, 04 mai 2013 22:03)

    This is a great article! Thank you for sharing!

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